vendredi 31 mars 2017

Dernier volet de la trilogie : créer des lecteurs durables

Dernier épisode avec ma question fétiche : "Comment créer des lecteurs durables ?" 


On l'a vu ici, ou là, un ado qui lit, c'est quelqu'un qui sait qu'il est lecteur, qui sait que cela lui apporte du plaisir, qui sait bien lire, qui a créé des habitudes et qui a donc des besoins liés à la lecture (cf billet précédent, et on peut agir pour cet objectif).
Mais cela ne suffit pas. Il faut qu'il sache aussi où aller chercher ses lectures une fois qu'on lui a lâché la main !

J'ai déjà évoqué des tonnes d'actions que l'on peut faire au CDI, qui permettent de mettre en place ces habiletés durables :
- des occasions multiples de faire connaissance avec la lecture et d'y prendre plaisir
- la création d'une identité de lecteur par la participation à une communauté
- l'existence d'un outil de communication qu'on peut continuer à consulter, voire alimenter
- la connaissance des sites qui donnent des idées.

Ce qu'on peut faire en plus, c'est l'aider à créer des liens extérieurs au CDI :
-  Lui faire créer des liens, pas seulement entre lui et les librairies et les bibliothèques (avec des visites), mais surtout AVEC les libraires et bibliothécaires (avec des rencontres)
- Passer le relais aux profdoc de lycée : en faisant par exemple un club lecture sur place au lycée, pour que tout le monde s'identifie.


Idée 4 : Passer le relais aux collègues de lycée.
    Je pourrais par exemple rajouter une sortie proposée aux 3e, dans le CDI de leur futur lycée, pour faire connaissance avec les profdoc. Une rencontre pour les 3e volontaires, à laquelle les anciens du collège seraient conviés ?
    Et si on créé un journal littéraire au collège, une page pourrait être réservée aux anciens élèves.

Idée 5 : Passer le relais aux libraires et bibliothécaires
   Tant que j'étais à la librairie, samedi dernier, j'ai prévu avec le libraire BD une rencontre au collège un midi (ça c'est facile), puis une visite à la librairie pour aller acheter des livres. Il faut que les élèves se sentent familiers des gens qui travaillent, pas uniquement des lieux, pour oser demander des conseils.
   Du côté de la bibliothèque, les projets mis en place suffisent à bien passer le relais. C'est un point sur lequel on a pas trop mal réussi : sortie à la bibliothèque du quartier pour toutes les 6e, puis l'année suivante à la médiathèque pour les 5e volontaires, participation à tous les projets lecture mis en place au CDI.


Et ça marche, tout ça ? Entrée en piste des statistiques !


Allez, je pourrais m’arrêter là, continuer à fanfaronner, dire que mes élèves lisent grâce à toutes les belles choses qu'on met en place années après années depuis 20 ans...
J'aurai pu.
Mais je viens de faire des statistiques. Je me doutais bien de quelque chose, mais quand-même...

                ...sans perdre courage, 
      Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage...


Depuis quelques semaines, je n'ai plus qu'une dizaine d'élèves le matin aux récrés, là où le flux était plus proche de 50 élèves jusqu'à l'an dernier et même au 1er trimestre.
Il y a moins de monde qui vient au CDI ? Mais non !
2700 passages déjà sur heures d'étude (78 % des élèves), contre 2800 l'an dernier deux mois plus tard (73 %). Forcément, avec deux heures de cours par semaine au lieu de 14 ou 15, ça laisse le champ libre à l'étude.
Donc, il n'y a jamais eu autant d'élèves à venir, et à revenir : 60 % sont déjà venus plus d'une fois (contre 56 l'an dernier). C'est le 1er effet réforme !

Mais ils viennent faire quoi ?
Travailler, pardi. Aux tables à partir de la 4e-3e (compromis pour ne pas les perdre) et aux ordi, beaucoup, à partir de la 6e. De plus en plus de projets exigent qu'ils travaillent sur ordi, moi y compris avec l'EMC ou les projets français nuages de mots.
Lire ? Un peu. Des BD et des mangas, surtout.
Ils empruntent ? Hum hum...  955 prêts cette année à ce jour, contre 2000 l'année dernière. Mais si !
Un peu de BD et mangas (400 contre 800 l'an dernier), de plus en plus rarement des romans (383 contre 1015 l'an dernier, et je ne compte pas les emprunts de séries. Si on voulait se faire mal, on pourrait même enlever les 125 romans prêtés dans le cadre d'un emprunt obligatoire en français, autant que l'an dernier).
Est-ce le 2e effet réforme ? Aurais-je eu raison de jouer les Cassandre l'an dernier, quand je prédisais que si j’arrêtais de voir les élèves régulièrement, ils arrêteraient de lire ? Un ado, si on arrête de lui mettre le nez dans les livres, il s'arrête de lire ! 

Je n'ai plus que quelques élèves en club le midi, alors que c'était une des activités phare il y a quelques années. Pour me rassurer, je me dis que je ne suis pas la seule au collège à regretter le manque d'investissement des élèves, et de nombreux clubs ne font plus recette. Est-ce l'effet génération d’aujourd’hui, qui ne veut aucune contrainte, ou ai-je ma part de responsabilité ? Mes idées de ces derniers jours suffiront-elles ?

Je me pose des tas de questions sur mon influence sur les élèves. Est-ce que je sers seulement à leur prêter un ordi pour imprimer en cata une image pour l'espagnol ?
J'ai quand-même envie de recréer des liens de lecteurs, et continuer à croiser des anciens élèves à la bibliothèque et à la librairie !



Donc plus conclure : pour créer des lecteurs durables, il faudrait déjà arriver à les faire lire !!!!


Vous comprendrez que je vais commencer par m'atteler à les faire lire sur place (les élèves de l'étude ? Mais comment les contraindre ? En étant sur leur dos tout le temps ? Ils vont détester, et moi aussi. Je vais relire la liste des "idées pour les faire lire", et vérifier point par point que je le fais), puis à les faire emprunter, avant de me replonger dans les objectifs qui étaient les miens depuis quelques années : les faire lire après.
Retour en arrière, changement de cap, il faut que je trouve d'autres idées, que je reprenne des vieilles recettes oubliées, des marmites de livres à apporter dans les classes, des chariots dans la cour, que sais-je encore. C'est dur, de ne plus être leur "prof du lundi"...

J'ai rédigé un résumé des trois billets, et je l'ai diffusé à mon administration, avec le bilan du CDI dans les parcours, et le bilan EMI.
Et puis, à force de réfléchir, une idée folle m'est passée par la tête cette semaine.
Et si...

dimanche 26 mars 2017

Des lecteurs du soir ? Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage...

      Avant donc que d'écrire, apprenez à penser.
      Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement,
      Et les mots pour le dire arrivent aisément.
      Hâtez-vous lentement, et sans perdre courage,
      Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage,
      Polissez-le sans cesse, et le repolissez,
      Ajoutez quelquefois, et souvent effacez.

      Boileau, L'Art poétique



C'est beau, non ? A lire à haute voix, en articulant comme mon grand-père le faisait, pour savourer.


Donc, il y a quelques jours, je me demandais ici comment faire pour qu'un ado de 14 ans reprenne un livre après une lecture qui lui a plu ? C'est ça, être lecteur, non ?


On pourrait dire qu'il faut :

1- Qu'il se considère comme appartenant à la communauté des lecteurs, qu'il en soit fier

2- Qu'il sache ce que la lecture lui apporte, et donc aussi ce qu'il perd en arrêtant ! Qu'il ait développé des habitudes et donc une certaine dépendance par rapport à la lecture comme loisir.

3- Qu'il connaisse ses goûts, qu’il sache quel lecteur il est

4- Qu'il voit ses parents lire ! C'est drôle, hein, tous ces adultes qui regrettent que les enfants ne lisent pas, ou pas assez, ou pas les livres qu'il faut ! S'ils savaient que la balle est souvent dans leur camp !

5- Qu'il sache où trouver des idées de lecture pendant ses années collège (ça, c'est notre travail !)

6- Qu'il continue à trouver des idées de lecture APRES le collège (on peut peut-être donner un coup de main)


Mea culpa, si je ne suis pas trop mauvaise pour faire lire aux élèves des livres qui leur plaisent (billet précédent), j'ai laissé tomber certains de ces objectifs-là. Pour ma défense, je pourrais avancer qu'il est difficile d'agir au mieux quand on voit peu de classes pour des projets lecture, et que depuis quelques années, les élèves fuient les clubs et toutes formes de contrainte sur temps libre.
Mais il doit y avoir quand-même des solutions pour ne rien regretter.
Il faut donc que je reprenne ces objectifs un par un, pour trouver des nouveaux ressorts à ma pratique.



Idée 1 : Pour commencer, je vais essayer de recréer une communauté en imposant des projets communs.

Depuis quelques années, pour ne pas faire fuir les élèves de club, je les laisse faire leurs projets à eux, j'interfère le moins possible. On a même enlevé le mot "lecture" du nom de club, trop risqué !
Mais du coup, on ne monte plus de projets ensemble, on ne fait plus de vidéos de groupe, on ne crée plus de fausses émissions de télé collectives, on ne fait plus l'école buissonnière pour aller choisir des livres à la librairie. Et l'image du club se délite, son identité disparaît.

Il faut que j'essaie de recréer un esprit collectif :
- Trouver une idée fédératrice : un projet unique, une vidéo ou un journal auquel tout le monde collaborera. Je vais opter pour commencer pour le journal, les élèves étant déjà partis sur des petits projets. On verra l'an prochain.
- Refaire des sorties ou organiser des rencontres, et tant pis si c’est une galère à organiser, et que les élèves ont des cours à rattraper.
Photo personnelle
Sortie librairie pour interviewer les libraires.

Et il faut que j'arrive à ce que des élèves viennent (ça parait bête, hein !) :
- Qu'ils sachent que ça existe. Et c'est pas gagné ! Parce que les affiches, n'est-ce pas... Alors quoi faire de plus ? A part passer dans toutes les classes plusieurs fois pour en parler, je ne vois pas. Le marque-page, peut-être ? cf plus bas.

- Donner envie aux élèves de venir. Visiblement, mes TUC ne suffisent plus ! Un collègue va manger à la cantine avec les élèves du club lecture, c'est une sacrée bonne idée. En plus, cela donne une visibilité au groupe.
Pour cette année, je laisse tomber le prosélytisme, mais l'an prochain, il va falloir de la pub et un super projet pour relancer la machine. L'expo Harry Potter postée par une collègue m'attirerait bien ! Du sacré bon boulot ! J'aimerais associer les élèves à la création d'une expo de ce type.



Idée 2 : Pour cette communauté il faudrait un outil de communication fédérateur et durable.

Fédérateur pour faire exister le groupe, et durable pour que les anciens élèves (ou les 4e-3e qui ne veulent plus venir manger des TUC...) continuent à se référer à nos idées de lecture. C'est donc un outil qui peut servir pour aujourd’hui, et pour demain.

Parmi les options possibles, d'ailleurs cumulables :

- Une rubrique dans esidoc, que les anciens élèves pourraient continuer à aller voir ?

- Un bulletin d'info envoyé par courriel ? via Pronotes ? via Folios ?

- Une page facebook ? Elle existe déjà, mais je suis la première à leur dire ne pas s'abonner, de ne pas mettre de commentaires pour ne pas s'exposer... qu'on peut y aller sans avoir de compte...

- Un journal littéraire, avec des conseils de lecture rédigés par les collégiens, disponible en ligne et à la bibliothèque ? Tiens, ça, c'est une idée ! Je suis déjà lancée, je vous en reparlerai ! Je pense utiliser un compte ouvert Madmagz en payant la somme nécessaire à la fin d'un magazine pour obtenir le pdf à imprimer.


Idée 3 : Il faudrait davantage faire connaître les sites qui donnent des idées de lecture, ou créer nous-même des outils

Une idée toute bête que j'ai pratiqué pendant longtemps, et laissé tomber à tort, alors qu'il permet de cibler les lecteurs : créer des marque-pages avec des infos, des sites, les RDV programmés... Les imprimer sur du bristol (attention toutes les imprimantes ne supportent pas cette épaisseur de feuille) et les faire décorer par des élèves, c'est encore mieux.

On peut aussi faire des bulletins A5 "Vous avez aimé ceci, vous aimerez cela" ou "vos parents ont aimé vous piquer ceci, faites-leur lire cela". J'en ai des tonnes dans mes vieux fichiers. Les lecteurs aiment collecter ce type de bulletins. Ils les conserveront, et qui sait, les retrouveront plus tard, dans quelques années.
Si le titre est en caractère à remplir avec des couleurs, les Z adoreront mettre de la couleur, et cela fera d'une pierre deux coups : ils connaîtront l’existence de ces bulletins. A refaire, donc !

On dépouille déjà les sélections des magazines, mais je ne leur ai pas encore fait utiliser des sites comme Babelio. On pourrait aussi chercher des chaînes de booktubeurs.

Logo site
Un des sites à faire connaître

Et pour le point 6, "Qu'il continue à trouver des idées de lecture APRES le collège", on fait quoi, alors ??

Suite au prochain épisode. Il faut déjà que je mette en place les idées de la semaine !
Mais j'ai des pistes ! Et elles sont à chercher du côté de l'outil de communication fédérateur si on a réussi à le créer, du côté des libraires et bibliothécaires, et des collègues de lycée. Il va falloir créer des passerelles.


      Hâtez-vous lentement, et sans perdre courage,
      Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage...


mercredi 22 mars 2017

Faire lire, c'est pas sorcier ! Faire qu'ils continuent à lire ? Ce serait magique !


Couverture
La brochure des librairies Sorcières de l'année de mon Bac :
j'avais mis le poster dans ma chambre !
J'ai déjà expliqué ici que les projets lecture comme j'en ai fait pendant des années ne servent sans doute à rien. J'ai d'ailleurs arrêté de me culpabiliser de ne plus mettre en place ces projets lecture traditionnels et souvent d'ampleur.

La remarque d'un ancien élève, croisé samedi à la librairie (pas mal, non ?), m'a fait cependant me reposer des questions sur les projets à mettre en place.
"Je continue à lire, mais ce n'est pas facile. Je ne sais pas quoi lire. Dans le CDI de mon lycée, ce n'est pas pareil qu'au collège. Il n'y a pas de relation humaine comme il y en avait au collège."

Par "relation humaine", faut-il entendre :
- participation à une communauté de lecteur : il a participé activement à l'organisation du Mangamado, notre ancien prix manga, et à tous les moments forts de la vie d'un CDI, rangement, déplacement d'étagères, organisation de projets...
- le fait que, le connaissant bien du fait de tous ces projets, je ne l'ai pas lâché, lui et ses mangas, de la 6e à la 3e.

Il avait fini par se lancer en 3e dans les romans de SF, de fantasy. A la librairie, il avait un manga sous le bras. A-t-il essayé de lire autre chose depuis deux ans ? Et à qui a-t-il osé demander un conseil ?

Alors, qu'est-ce que je pourrais mettre en place pour que les lecteurs de 14 ans ne lâchent plus jamais la lecture ?
Je me suis déjà posé cette question mille fois, j'ai déjà essayé d'y répondre, notamment ici. Mais même si je suis sur la voie, il y a encore des choses à faire. Sérions les problèmes, et commençons par le commencement.


La première question à se poser, c'est comment faire lire des collégiens. Et ça, franchement, c'est pas sorcier !

Pour faire lire des collégiens, il faut mettre dans sa marmite, sous leurs yeux et dans leurs mains :
1- Des "bons" livres adaptés à tous les niveaux de lecture : des romans qu'on ne peut pas lâcher, des beaux albums, des livres documentaires étonnants...
2- Les avoir lus (ça parait bête, hein ?)
3- Ne rien dire quand un "grand" lit un "petit" livre !
4- Bien connaître les élèves
5- Les considérer comme des lecteurs qui ne prennent plus le temps de lire, et surtout pas pour des non-lecteurs. Donc, il faut leur donner du temps de lecture sur place, créer des moments de rencontre avec des histoires, tourner le dos pour les laisser tranquille, et croiser les doigts.
6- Les mettre en confiance depuis la 6e, pour qu'ils reçoivent nos conseils de manière bienveillante

Slogan Librairies sorcières
Slogan Librairies Sorcières
Et dans la marmite des collègues :
7- Qu'ils les emmènent choisir des livres
8- Qu'ils leur donnent du temps pour lire sur place (je n'ai plus de classe en cours régulier, donc la balle n'est pas dans mon camp !)

Et c’est tout !
Bon, on pourrait rajouter qu'ils sachent lire, que ce ne soit pas trop douloureux de déchiffrer un paragraphe et de s'en souvenir, qu'ils comprennent le vocabulaire, les effets littéraires de type flash back, les récits à deux voix... Mais ce n'est pas dans nos missions à nous. Et c'est utile pour qu'ils progressent en lecture, pas pour qu'ils aiment lire.




Par contre, si on veut que ces collégiens lecteurs lisent le soir, et encore mieux, devenus lycéens puis adultes, qu'ils continuent à lire, c'est plus complexe. 


Il faut...

Suite au prochain épisode ! Je peaufine mon plan de bataille avant !
Et puis comme ça, ça fera un billet un peu moins long...

mercredi 15 mars 2017

Vide ton sac

Voici le bilan d'un projet que j'ai lancé avec l'infirmière. D'abord dénommé "Groupe de parole", nous avons finalement opté pour "Vide ton sac".

Après maints et maints ajustements, nous sommes arrivées à une formule qui semble convenir aux souhaits des élèves et des adultes.

Public :
Elèves volontaires de tous niveaux, libres le mardi de 15h30 à 16h30 (une semaine sur deux, toutes les classes sont libérées. Du coup, même les externes peuvent être touchés).

Encadrants :
L’infirmière et le professeur documentaliste

Lieu :
Au CDI, mais le CDI reste ouvert.
Je fais des allers-retours entre le CDI et la salle de travail où ils sont installés. Cela permet de ne pas fermer le CDI, mais aussi d'augmenter le nombre d'élèves qui viennent. Certains élèves changent de salles, s'étant installés au CDI sans trop savoir quelle activité était proposée à côté. J'ai déjà eu l'occasion de regretter qu'ils ne lisent pas les affiches, je rajoute qu'ils n'écoutent pas non plus quand on annonce sous le préau qu'il y a cette activité ! Ils m'épuisent !

Contexte de création : 
Nous avons commencé toutes les deux par animer un club lecture le midi, sur un thème lié au domaine de la santé ou du social (famille, frères et sœurs, harcèlement, ...). Cela marchait bien, mais nous étions frustrés de n'avoir que 30 minutes au maximum, les élèves ayant manifestement des tas de choses à dire. Par ailleurs, l'infirmière avait ressenti le besoin de faire parler entre eux des élèves avec des problématiques douloureuses identiques : je suis tout seul, j'ai du mal à m'intégrer, je me fait embêter, je m'ennuie en cours, je suis tout seul à ressentir cela...

Préalables :
- Charte à signer (confidentialité, respect des autres...)

- Les sujets trop personnels ou familiaux sont écartés pour éviter que des sujets trop privés soient évoqués devant tout le monde

Déroulé d'une séance :
- On se prépare une boisson (chaude ou froide, c'est un mini salon de thé, le CDI...), on profite de ce temps d’installation pour accueillir les nouveaux (il y en a toujours !) pour leur expliquer le fonctionnement
- 15 minutes de "vidage de sac" : "Alors, cette semaine, comment ça a été ? Qui veut vider son sac ?" avec une discussion à bâtons rompus. Pensez à expliquer le sens de l'expression... Les expressions françaises, ça se perd !
- Ensuite, selon la séance et le ressenti des adultes, on laisse la discussion se poursuivre, ou on met l'accent sur un sujet qu'on garde sous le coude (famille, sport, hygiène alimentaire/sommeil, les amis, l'école, les loisirs) ou encore on propose une activité (relaxation, estime de soi, respect de l'autre, atelier d'écriture, dessin...).

Objectifs :
- Offrir aux élèves un moment à eux, où la parole est libre et le contexte convivial et détendu
- Aborder certains sujets parfois sensibles pour les dédramatiser, et le cas échéant essayer de trouver ensemble des solutions
- Leur donner la patate ("La vie, c'est chouette !"), la banane ("Tu sors d'où, toi, pour sourire comme ça ?") et les faire communiquer entre eux, créer du lien, et des liens
- Si des problèmes plus graves étaient détectés, l'infirmière prendrait les élèves en individuel, ou les orienterait vers l'assistant social.

Bilan : 
Maintenant qu'on a fait les ajustements et qu'on s'est rodées, on est vraiment contentes de l'ambiance que cela crée. On a demandé aux élèves pourquoi ils venaient. Un des fidèles nous a dit : "Je ne sais pas, je suis bien, là !". On va s'en contenter, pour garder la patate, et la banane !

vendredi 3 mars 2017

Créer un journal collaboratif avec 1jour1actu

Cette année, au moment du réabonnement à 1jour1actu, j'ai découvert qu'une option était proposée en collaboration avec le site Madmagz.

Cela permet de créer autant de journaux que l'on veut, avec une maquette limitée : une page de couverture, une page de fin (BD et ours), et entre les deux, on met ce qu'on veut, en choisissant entre 4 modèles de pages.

J'ai créé une adresse CDI spéciale pour créer un compte sur internet. J'ai pu ainsi donner les identifiants aux collègues s'ils souhaitent s'en servir de leur côté sans passer par moi.

Pour l'instant, nous avons lancé 3 projets : un journal 6 pages sur une sortie scolaire (EPI 5e architecture et moyen age), un journal 4 pages pour retracer un projet scientifique en 4e segpa, et un journal 4 pages pour un club.

J'ai dans l'idée, vu comment on s'amuse comme des fous avec cet outil, que je vais mettre assez vite les classes de 6e dessus, pour rédiger un journal de leur année, avec un petit peu de chaque classe, les projets, sorties, cours, impressions de début d'année, conseils aux CM2... Cela pourrait être fait en Vie de classe (brainstorming, recherche d'idées, constitution des groupes, démonstration du logiciel) et en français (rédaction et finitions). On pourrait le distribuer à chaque élève de CM2 en fin d'année, en passant par les écoles, ou à la rentrée de septembre. Pour les Portes ouvertes, c'est raté, c'est demain !

Pour ceux qui seraient tentés de se lancer, voici quelques éléments pour démarrer plus en douceur que moi... Ben oui, on a essuyé quelques plâtres.

Préalables

- Prévoir une info (je n'ose plus dire un cours) aux élèves sur les obligations des journalistes : droit d'auteur, droit à l'image
- Si le journal doit être diffusé, prévoir des autorisations parentales (cf exemple rédigé pour notre collège)

Définition du contenu et organisation matérielle


- Brainstorming avec la classe (difficile quand plusieurs classes travaillent sur le même journal) ou entre profs pour prévoir les sujets, le nombre de pages, les modèles de pages choisies, les élèves qui travaillent ensemble. On peut mixer la formule : choisir entre adultes les grands thèmes, le nombre de pages et la maquette, se séparer les pages entre les classes, et ensuite laisser les élèves s’approprier le contenu.

- Nous avons créé un chemin de fer avec 1 post-it par encadré. Le thème était déjà inscrit sur les post-it ou ont été choisis en direct. Les élèves prenaient leur post it, rajoutaient leurs prénoms, et en fin d'heure, recollaient le post-it sur le chemin de fer. Il faut prévoir d'avoir photocopié les modèles de pages possibles en plusieurs exemplaires, pour pouvoir choisir plus facilement :
Document personnel
Notre chemin de fer
- J'ai créé en amont un compte utilisateur par page : page1, page2, page3...
Pour éviter que deux groupes se connectent en même temps, j'ai rajouté un post-it d'une autre couleur sur le chemin de fer. En effet, chaque page ne peut être ouverte que par un seul utilisateur à la fois. Les élèves qui auront reçu l'autorisation de se connecter iront chercher le post-it, qui du coup ne sera plus sur le tableau !
Si vous trouvez ce post-it inutile, imaginez-vous en train de courir entre 12 équipes qui travaillent sur les encadrés devant figurer sur deux pages seulement ! Se souvenir qu'on a dit OK à un groupe pour modifier la page3, c'est mission impossible...

Organisation du travail des élèves


- Pour les textes, j'ai choisi l'option "brouillon à la main" puis mise au propre au traitement de texte. Ne pas les mettre sur le site directement peut être un gain de temps appréciable, puisque du coup, on peut faire travailler tous les élèves en même temps. Le traitement de texte permet en outre de corriger plus facilement (correcteur orthographique + impression plus facile). Dernier avantage et non le moindre : en cas de perte de la page (il y a des bugs, attention !), on a la sauvegarde des textes, il "suffit" de refaire les copier-coller. Le seul inconvénient est que les élèves ne visualisent pas ce que ça donnera dans le journal, ni la longueur nécessaire. Et c'est moins motivant. Il ne faut donc pas tarder à les mettre sur le site.

- Quand on a validé le texte d'un groupe, on peut leur donner l'autorisation d'aller remplir la page sur le site. J'ai mis le lien vers le journal collaboratif dans esidoc. Une fois sur la page, les élèves tapent le nom d’utilisateur de leur page (page1, page2...).

Fin de séance et début de la suivante


On peut imaginer que les élèves n'envoient leur page que quand elle est entièrement terminée.
Inconvénient : des élèves mal intentionnés pourraient entre deux cours aller supprimer le travail des autres, puisque le lien est dans esidoc. Si on donnait le lien via pronotes, le problème serait le même.
Mais comme on tape les textes sur traitement de texte avant de les coller dans le journal, ce n'est pas trop grave tant que la page n'est pas bien avancée.
On peut donc passer le post-it de groupes en groupes, pour que chacun remplisse son petit morceau, pendant les premières heures de travail.
J'ai attendu que les pages soient à peu près terminées pour leur demander de les envoyer. Cela m'a permis de mouliner un pdf intermédiaire pour l'envoyer aux collègues pour qu'ils voient l'avancée du travail et puissent noter les corrections à faire sur les feuilles imprimées.

Par contre, il faut leur demander de bien se déconnecter avant de fermer la page internet.

Au début de la séance suivante, selon l'état d'avancement, on peut mettre directement les élèves au travail, ou, en fin de projet, si les pages ont été envoyées la fois précédentes, on fait un point au vidéo-projecteur.
Je sais, j'ai de la chance, un CDI avec salle de travail, vidéoprojecteur, et ordis en nombre suffisant, c'est pas courant ! Mais avouez que c'est un sacré problème que les conseils départementaux ne sachent pas ce que devrait être un CDI digne de ce nom ! 
On passe en revue les pages pour leur faire prendre conscience qu'ils sont dans un travail collectif, c'est la fameuse conférence de rédaction. Au fur et à mesure qu'on a visionné les pages, on les ré-envoie aux équipes pour les corrections (il y a un bouton spécial).

Après 3h de travail (dont 1h pour le brainstorming) avec une classe de 5e, ils n'avaient encore rien tapé ou presque sur les pages. C'est fou ce que c'est long de faire écrire des élèves. Et encore, ils écrivent sur une visite qu'ils ont faite, il n'y a pas de recherche doc ! J'ai donc récupéré 1h d'étude pour avancer la rédaction et la saisie. Du coup, en 1h de plus, ça a avancé d'un coup. Mais il manque encore des textes, les corrections, et les illustrations. Et je n'ai plus la classe en heure CDI, donc j’attends que la collègue reprogramme une heure de cours.
J'ai aussi appelé au secours le collègue de segpa, pour m'aider à faire écrire les élèves, seule je n'y arrivais pas. Il leur a fait terminer et corriger les textes et les dessins en cours de français, et ils n'auront qu'à les mettre aux bons emplacements avec moi sur leur heure au CDI. Il y a passé 3h !
Il ne faut donc pas se lancer dans ce type de projet si on n'a que peu d'heures, et si on est seul ! Un projet, quoi !


On en fait quoi après ?

Quand on aura terminé, je moulinerai un pdf, il sera mis sur le padlet des journaux dans le site du collège. J'imprimerai une version papier pour le CDI. 

Nous n'avons pas encore décidé si nous allions le photocopier pour chacun des élèves. Ce serait mieux, mais avec 6 pages pour 50 élèves, ça fait beaucoup de photocopies... 
On pourrait prévoir de lui donner vraiment le statut de journal du collège, et le vendre un prix symbolique (quand on paie 10c un journal, on ne le jette pas). Cela permettrait à des élèves qui ne sont pas les auteurs de l'acheter, et ainsi de valoriser le travail des élèves. Aucune décision n'a encore été prise à ce sujet.


BILAN

C'est vraiment chouette comme façon de travailler. Les élèves travaillent comme des journalistes, en équipe. Ils voient le résultat prendre forme. Et c'est très facile à gérer pour le coordinateur adulte.
On peut évidemment faire la même chose avec le site magmaz directement, qui est gratuit dans une certaine mesure, ou avec une maquette créée avec libre office dessin ou scribus, qui serait mise à disposition des élèves dans un réseau. Dans ce cas, le même déroulement de projet serait envisageable.

Quand ce sera terminé, je mettrai à jour ce billet si de nouvelles idées nous sont venues, ou si des problèmes sont apparus. Je mettrai un lien vers les journaux. 

Tous nos journaux !


4e SEGPA, 31 mars : volcans et séismes


Les 5e SEGPA :